Merz au pouvoir : un gaullisme made in Allemand

L’investiture de Friedrich Merz à la chancellerie allemande par le Bundestag était le 6 mai dernier, après plus de deux mois de négociations suivant la victoire électorale de la CDU. Reflet de la particularité démocratique allemande, le système évite soigneusement l’élection directe du chef de l’exécutif – héritage d’une méfiance profonde envers la concentration du pouvoir depuis l’époque nazie.

À 69 ans, ce fils du Sauerland, territoire réputé pour son dynamisme entrepreneurial, incarne une autre forme de gaullisme, celle à l’allemande. Autorité, vision souveraine et pragmatisme sont au programme. Son tempérament impatient et sa personnalité assertive contrastent radicalement avec l’approche mesurée d’Angela Merkel. Pilote de son avion personnel pour contourner les retards ferroviaires allemands, Merz affiche des similitudes de caractère avec Emmanuel Macron, avec qui il affirme entretenir d’excellentes relations. Son déficit de popularité est notable, seulement 17% des Allemands exprimant une opinion favorable à son égard.

Le nouveau chancelier affronte d’emblée des défis colossaux. Sur la scène internationale, il doit naviguer entre le conflit ukrainien et les tensions commerciales avec les États-Unis, marché crucial pour les exportations allemandes. En politique intérieure, sa marge de manœuvre est limitée par son alliance avec les sociaux-démocrates et la montée continue de l’AFD, formation désormais officiellement classifiée d’extrême-droite par les services de renseignement.

Face aux enjeux de défense, d’environnement, de migration et d’infrastructures vieillissantes, Merz adopte une posture gaullienne en abandonnant le principe sacré de limitation de la dette pour débloquer 500 milliards. Sa vision atlantiste teintée d’indépendance nationale, combinée à sa lucidité concernant le désengagement américain sous Trump, pourrait paradoxalement revitaliser la coopération franco-allemande et repositionner l’Allemagne comme pilier d’une Europe plus autonome.